Analyse pragmatique et littéraire des compliments dans quelques romans courtois des xiie et xiiie siècles
Résumé
L’acte de langage du compliment est au carrefour de phénomènes idéologiques (on complimente à partir de valeurs communes sur des objets spécifiques), sociaux (il met en cause les faces des individus et rend compte des rapports de force à l’intérieur d’un groupe donné) et linguistiques (ils reposent sur des constructions lexico-syntaxiques qui permettent, dans un contexte énonciatif donné, de les reconnaître comme tel). Le corpus retenu pour cette étude ne nous permet pas véritablement de cerner la valeur illocutoire réelle des énoncés repérés. Ces formulations axiologiques positives sont-elles des compliments ou jouent-elles simplement le rôle d’arguments pour une requête ou une offre ? Si quelques effets perlocutoires, comme l’embarras ou la satisfaction ressentis par les personnages, l’attestent, la description de leurs réactions n’est pas assez développée pour qu’on en soit sûrs à chaque fois. Dans bien des cas, le compliment semble n’avoir pas de valeur de cadeau et se limite peut-être à une information accompagnant un autre acte de langage, quoique l’énergie que met un Lancelot à refuser les compliments et celle d’un Tristan à les solliciter, outre qu’elles contribuent à la caractérisation de ces personnages romanesques, attestent de la réalité sociale de ces types de réaction.