La chambre obscure de Vanda : imaginaire et archéologie d’un outil - Université Grenoble Alpes Accéder directement au contenu
Chapitre D'ouvrage Année : 2020

La chambre obscure de Vanda : imaginaire et archéologie d’un outil

Résumé

Avec Dans la chambre de Vanda (2000), Pedro Costa fait un film d’auteur avec une caméra amateur, la Panasonic 100. Ce camescope mini-DV a permis au cinéaste de s'installer dans un bidonville de Lisbonne et la chambre d'une toxicomane. En utilisant cette caméra « facile », le cinéaste veut se rendre la vie « difficile », comme l’est celle de Vanda, le personnage principal du film. Pour cela, il commence par envisager cette caméra à contre-emploi : alors qu’elle est pensée pour filmer ce qui est familier et conçue pour être mobile, il filme dans un lieu en ruine en la fixant sur un pied. « On croit toujours qu’une caméra DV, c’est fait pour bouger dans tous les sens, pour faire des choses rapides, réactives. Ça ne m’intéresse pas ». S’il refuse la mobilité de la prise de vue, la portabilité de la petite caméra lui permet de s’installer dans cette chambre très étroite où il tourne quotidiennement pendant deux ans, multipliant les prises. La caméra statique laisse assez de place dans ce petit théâtre pour libérer les mouvements du travail entre le cinéaste et les acteurs du film. Face à la simplification technique de la caméra amateur, le cinéaste prolonge l’outil en utilisant encore des moyens pauvres (miroirs, des réflecteurs…) afin de travailler le peu de lumière naturelle qui parvient à éclairer l’intérieur de la chambre. Par ces gestes autour de la caméra « limitée », il réintroduit de la technicité là où il n’y en a plus beaucoup. En questionnant la singularité de cette démarche qui consiste à sublimer à la fois le lieu et les personnes en réintroduisant un travail sophistiqué autour d’une caméra simplifiée,  transformer l’outil serait-il, la condition nécessaire pour retrouver par l’effort, un rapport magique à cette réalité ? En recréant dans l'espace physique de la chambre de Vanda, la chambre obscure qui n'existe plus dans la petite caméra numérique, Costa ne déplacerait-il les enjeux de la création posée par la démocratisation de la technique, résumés ainsi par Walter Benjamin, « La cathédrale quitte son emplacement pour entrer dans le studio d’un amateur ; le choeur exécuté en plein air ou dans une salle d’audition, retentit dans la chambre » ?
Fichier non déposé

Dates et versions

hal-01991618 , version 1 (23-01-2019)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01991618 , version 1

Citer

Vincent Sorrel. La chambre obscure de Vanda : imaginaire et archéologie d’un outil. Catherine Bizern. Varan, Pratique d'une utopie, éditions de l'Oeil, 2020, 978-2-35137-279-1. ⟨hal-01991618⟩

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