A partir de deux bandes dessinées françaises parues 70 ans après le décès de Zweig (Thomas Humeau, éd. Sarbacane, 2015 et David Sala, Casterman, 2017), et inspirées de sa célèbre nouvelle Le Joueur d’échecs, dernière œuvre écrite avant son suicide, cet article permet d’examiner les modalités de l’adaptation de classiques de la littérature dans d’autres médias. La question de l’adaptation est ici associée à la problématique des transferts culturels, ainsi qu’à celle du traitement des références culturelles selon le public visé. Le fil directeur du questionnement est l’idée d’Europe, que chacun des deux dessinateurs va interpréter à sa manière, en s’appuyant – ou non – sur l’atmosphère, les associations et les souvenirs présents en filigrane dans le texte de Zweig. La confrontation des deux réécritures, à la fois entre elles et avec le texte original, permet d’interroger le traitement de cette « patrie spirituelle » européenne à 70 ans d’intervalle, dans des œuvres relevant respectivement des classiques littéraires et d’une littérature crossover s’adressant à tous les âges. Sans doute permet-elle de tirer quelques conclusions sur les manières de penser l’Europe hier et aujourd’hui.