Objets centraux des sciences de l’éducation, les pratiques enseignantes sont au cœur de nombreuses théories comme celle de Dominique Bucheton et son équipe, qui ont défini un modèle d’analyse de l’agir enseignant, le multi-agenda, aidant à comprendre l’ « enchâssement de préoccupations multiples » à prendre en compte : le maintien d’une atmosphère, le pilotage, l’étayage et le tissage (Bucheton, 2009). Ces préoccupations sont actualisées dans les gestes de l’enseignant ; or, la réception de ces gestes par les élèves détermine leur opérationnalité (Marlair, Dufays, 2008). Les élèves considèrent-ils certains gestes comme plus professionnels que d’autres, mieux ajustés aux situations (Jorro, 2006) ? Dans quelle mesure l’analyse en varie-t-elle selon les élèves ? Dans le cadre d’une enquête collective conduite auprès d’une trentaine de collégiens de 4ème issus d’établissements contrastés, nous avons adopté une méthodologie d'allo-confrontation aux traces de l'activité utilisée par la plate-forme de formation Néop@ss (Ria, Leblanc, 2011). Deux séquences vidéoscopées, montrant deux enseignants travaillant avec une même classe d'élèves de 3ème, avec un succès différent, ont été soumises aux collégiens. L’articulation des catégories des enquêtés et celles de Dominique Bucheton et son équipe – permettant de penser les liens entre théorie et pratique – a donné lieu à une typologie des formes d’analyse, que nous présenterons en nous appuyant sur des exemples précis de gestes des enseignants (emploi d’une expression familière, rectification d’une erreur…). Notre étude montre que les élèves peuvent être considérés comme de potentiels experts de l’agir enseignant ; elle permet aussi d'accéder à certains des modes de catégorisation déterminant les modalités de leur participation à l’action conjointe (Sensevy, 2007).