Sciences sociales et politiques publiques : les dispositifs de lutte contreles sectes en France : histoire et sociologie d'une ingénierie de gouvernement - Politiques publiques, ACtion politique, Territoires
Thèse Année : 2019

Social Sciences and Public Policy : the Cult Vigilance Plan in France : history and Sociology of a Government Engineering

Sciences sociales et politiques publiques : les dispositifs de lutte contreles sectes en France : histoire et sociologie d'une ingénierie de gouvernement

Résumé

The "cults" were the subject of a strong media coverage following several tragedies that occurred abroad, then in France in 1995. Neither “sects” nor "cult", are defined in law, and those terms cover a concept which borders fluctuate according to the times and customs. Thus, the central question is that of the durability of a policy launched in response to a social and religious crisis. Can public policy to fight against sectarian excesses continue while its main object is unrecognizable? Does it undergo such transformations that, in the long run, it disappears to make room for new mechanisms more adapted to the evolutions of its initial objective?The theme is complex and fraught with conflicts, bringing into play the perception of the religious and the sacred, implying the conception of secularism specific to France. A first phase of problematization began in the 1970s, with the appearance in France of the Moon Church and associative mobilizations of parents of concerned followers. This setting on the agenda leads to the Vivien report in 1983, delivered to the Prime Minister, but does not lead to real action by the public authorities. The associative network, which is expanding rapidly, will become the spearhead of the struggle: both experts and actors in the field, "anti-cult", often committed activists, emotionally involved, are in a key position. In 1995, after the massacre of the Order of the Solar Temple in the Vercors, a real administrative apparatus is set in motion, attracting criticism from a part of the scientific community as well as from other nations, especially the United States, whose traditional conception of freedom of religion is bumped by this proactive policy.Subsequently, the policy knows a golden age, until 2005, once passed the "great fear of the year 2000" and the proliferation of apocalyptic movements. A circular terminates the use of the term "cult". The great religious movements have disappeared or "normalized", the sectarian phenomenon now covers a nebula of micro-movements, elusive and undefined in the eyes of the public. The policy begins a slow decline, which seems inevitable, linked to the explosion of its object as well as a growing mistrust of institutions that appear to censure religious free will. In the mid-2010s, however, "jihad" became a central public problem following the attacks. The cult awareness institutions, holding considerable expertise in the field of religious radicalization, are suddenly solicited, while at the same time, the fight against sectarian excesses continues with the appearance of new excesses that intertwine, supported by conspiracy theories. This thesis resumes, with the double prism of the analysis of public policies and socio-history, the chronology of the creation, the development and the relative decline of the French policy against the sectarian excesses.
Les « sectes » ont été l'objet d'une forte médiatisation à la suite de plusieurs tragédies survenues à l'étranger, puis en France en 1995. Puisque la « secte », vocable non défini en droit, recouvre un concept mouvant selon les époques et les moeurs, en filigrane, la question centrale est celle de la pérennité d’une politique lancée en réponse à une crise sociale et religieuse. Ainsi, la politique publique de lutte contre les dérives sectaires peut-elle perdurer alors que son objet principal est méconnaissable ? Subit-elle de telles transformations qu'à terme, elle disparaît pour laisser place à de nouveaux mécanismes plus adaptés aux évolutions de son objectif initial ?Le thème est complexe et clivant, mettant en jeu la perception du religieux et du sacré, impliquant la conception de la laïcité spécifique à la France. Une première phase de problématisation débute dans les années 1970, avec l'apparition en France de l'Eglise Moon et les mobilisations associatives de parents d'adeptes inquiets. Cette mise à l'agenda débouche sur le rapport Vivien en 1983, rendu au Premier Ministre, mais n'aboutit pas à une réelle action des pouvoirs publics. Le réseau associatif, qui s'étend rapidement, va devenir le fer de lance de la lutte : à la fois experts et acteurs de terrain, les « anti-sectes », souvent militants engagés, impliqués émotionnellement, sont dans une position névralgique. En 1995, après le massacre de l'Ordre du Temple Solaire dans le Vercors, un réel appareil administratif se met en mouvement, attirant des critiques d'une partie de la communauté scientifique aussi bien que d'autres nations, tout particulièrement les Etats-Unis dont la conception traditionnelle de la liberté de religion est heurtée par cette politique proactive.Par la suite, la politique de lutte connaît un âge d'or, jusqu'en 2005, une fois passés la « grande peur de l'an 2000 » et le foisonnement de mouvements apocalyptiques. Une circulaire met fin à l'emploi du terme « secte ». Les grands mouvements religieux ont disparu ou se sont « normalisés », le phénomène sectaire recouvre désormais une nébuleuse de micro-mouvements insaisissables et peu définis au regard du public. La politique entame un lent déclin, qui apparaît inéluctable, lié à l'éclatement de son objet tout comme à une méfiance grandissante envers les institutions qui apparaissent censurer le libre arbitre religieux. Au milieu des années 2010 cependant, le « jihad » devient un problème public central, à la suite des attentats. Les institutions de lutte, détentrices d'une expertise considérable dans le domaine de la radicalisation religieuse, sont soudain sollicitées, alors que parallèlement, la lutte contre les dérives sectaires se poursuit avec l'apparition de nouvelles dérives qui s'entrelacent, soutenues par les théories conspirationnistes. Cette thèse reprend donc, au double prisme de l'analyse des politiques publiques et de la socio-histoire, la chronologie de la création, du développement et du relatif déclin de la politique de lutte contre les dérives sectaires.
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Citer

Laure Gicquel. Sciences sociales et politiques publiques : les dispositifs de lutte contreles sectes en France : histoire et sociologie d'une ingénierie de gouvernement. Science politique. Université Grenoble Alpes, 2019. Français. ⟨NNT : 2019GREAH039⟩. ⟨tel-03400531⟩
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