Remarques sur la querelle de la régale - Institut d’Histoire des Représentations et des Idées dans les Modernités Accéder directement au contenu
Pré-Publication, Document De Travail Année : 2021

Remarques sur la querelle de la régale

Résumé

Réponse à Luc Taupenas, « Le Parlement, le roi et le pape : l'affaire de la régale ou la question du sacre », intervention dans le séminaire Parlement(s) et cours souveraines, en France et en Europe sous l'Ancien régime, Paris, Institut d'histoire du droit, 4 juin 2021 La toile de fond de la querelle de la régale est bien sûr la distinction entre deux sphères, deux pouvoirs qui revendiquent à leur profit des ressources : le temporel et le spirituel, la royauté et l'Église, et l'exposé de Luc Taupenas permet de rappeler judicieusement combien sont importants la mécanique fiscale et le système bénéficial au sein de querelles que nous abordons souvent par le seul angle de vue de l'histoire des idées politiques. De ce point de vue, le fil rouge qui montre les liens entre sacre et régale est très éclairant. Outre l'onction, le sacre est relié à l'importance d'une forme signifiante sur le temps long, le serment, à propos duquel on rappellera le grand livre de Paolo Prodi, Il sacramento del potere : il giuramento politico nella storia costituzionale dell'Occidente (Bologne, Il Mulino, 1992), mais c'est sur un autre point que l'on se propose d'insister : l'historicisation des libertés de l'Église gallicane. Développées en tant que telles à partir du XIV e siècle, avec déjà l'opposition entre un roi (Philippe Le Bel) et un pape (Boniface VIII), elles relèvent en réalité d'une plus longue histoire et d'une instrumentalisation de la sémantique de la « liberté » dépendantes de raisons géopolitiques marquées. Les libertés gallicanes renvoient à des listes plus ou moins longues de privilèges, de droits ou de particularités locales fondées sur des séries de preuves historiques (et en ce sens, ces dernières sont conçues comme étant radicalement indépendantes de l'autorité pontificale, leur authenticité relevant in fine de l'expertise érudite, et non pas d'un magistère), aussi, elles distinguent et opposent deux monarchies qui s'affrontent, chacune désignant les « libertés » de l'autre comme des abus, ou des privilèges illégitimes. Les libertés constituent donc un lieu de controverse et un instrument critique vis-à-vis d'une puissance adverse. En miroir du grand récit de la papauté, les auteurs « gallicans » rédigent une histoire qui prétend à la stricte continuité avec l'Antiquité (à une époque où le poids de la papauté était bien moindre, sans une forte structuration juridique), une histoire qui glorifie la résistance contre des nouveautés défigurant le message chrétien initial. Les Églises comme Carthage deviennent donc des modèles pour les gallicans, et surtout, certains passages des premiers grands conciles généraux deviennent des références à opposer à Rome. Ainsi du huitième canon du concile d'Éphèse qui définit la liberté de l'Église comme l'observance des « anciens canons », autrement dit d'un droit déjà préexistant. Lorsque Pierre Dupuy commente le fameux opuscule de Pierre Pithou, Les libertés de l'Église gallicane (1594), il affirme : « Le concile d'Éphèse général au canon VIII a dit que la liberté de l'Église consistait en l'observation des anciens canons, et anciennes coutumes, et qu'il fallait exactement prendre garde, ne clam paulatim libertas amittatur, quam nobis donavit sanguine suo Dominus noster Jesu Christus omnium hominum liberator. C'est ce que nous disons aujourd'hui, et parlons avec les Pères de ce grand concile ; que nos libertés consistent et subsistent en l'observation des anciens canons et des coutumes anciennes, que nous opposons à un nombre effréné de décrétales » ([Pierre Dupuy],

Mots clés

Fichier principal
Vignette du fichier
Gabriel, Remarques sur la querelle de la régale.pdf (86.99 Ko) Télécharger le fichier
Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

halshs-03688551 , version 1 (05-06-2022)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-03688551 , version 1

Citer

Frédéric Gabriel. Remarques sur la querelle de la régale : Réponse à Luc Taupenas, « Le Parlement, le roi et le pape : l’affaire de la régale ou la question du sacre », intervention dans le séminaire Parlement(s) et cours souveraines, en France et en Europe sous l’Ancien régime, Paris, Institut d’histoire du droit, 4 juin 2021. 2021. ⟨halshs-03688551⟩
67 Consultations
29 Téléchargements

Partager

Gmail Facebook X LinkedIn More