L’objectif de ces journées d’études était de réunir des spécialistes de plusieurs disciplines (historiens, géographes, archéologues, politologues) pour échanger leurs points de vue sur une région de l’Europe alors sous les feux d’une actualité dramatique. Toutes les périodes historiques devaient être abordées, de l’Antiquité à nos jours, afin de remplacer ces points de vue dans une perspective largement diachronique. Deux axes d’études étaient proposés : une approche historiographique permettant de voir comment a été faite, ou n’a pas été faite, l’histoire des Balkans aux différentes époques ; et une approche plus politique s’interrogeant sur les enjeux géopolitique et sur les facteurs expliquant les différentes crises qui ont secoué ces régions. Cette rencontre était aussi l’occasion de faire le bilan scientifique des activités du GDR 1052 du CNRS arrivé à son terme, et de définir de nouveaux axes de recherche pluridisciplinaires pour l’équipe Balkans du CRHIPA dans le cadre de la convention signée avec l’École française de Rome. Derrière les différents points de vue proposés, l’enjeu était de repérer un fil conducteur servant de trame à un discours historique. Or un terme est revenu plusieurs fois au cours des communications, celui de frontière : frontière naturelle, frontière politique, frontière ethnique, frontière culturelle. Le paradoxe des Balkans est bien là : c’est la terre de toutes les frontières, mais de frontières qui à peine tracées ou visibles se déplacent ou s’estompent tout comme les lignes de côte et les deltas. C’est la terre aussi de toutes les cultures, chrétiennes et musulmanes surtout, mais de cultures qui transcendent les ethnies en même temps qu’elles fondent des minorités. Ce destin ambigu s’affiche dès les origines : pour beaucoup de ces régions l’Illyrien est une langue fortement identitaire, mais une langue dont on ne connaît rien ou si peu, tandis qu’aujourd’hui trois alphabets – grec, latin et cyrillique – notent une bonne dizaine de langues ! Comme un parchemin plusieurs fois palimpseste, les Balkans s’offrent ainsi à une période complexe mais prometteuse où la patience raisonnée de chaque discipline doit être soutenue par la passion commune à tous les chercheurs. Puissent les jeunes chercheurs de notre École doctorale – et nos lecteurs – tirer profit de ces quelques réflexions et rejoindre nos programmes.